Le portage salarial : la solution anti-requalification

Premier chantier du quinquennat d’Emmanuel Macron, la loi travail fait l’objet de concertations avec les partenaires sociaux, notamment autour de l’un de ses axes majeurs : le plafonnement des indemnités prud’homales. Avec un objectif affiché, apporter plus de sécurité juridique et de visibilité budgétaire aux employeurs pour les libérer de la bien connue « peur d’embaucher ». Mais en ne traitant, une fois de plus, que du salariat au détriment du travail indépendant, cette nouvelle loi travail pourrait éluder une problématique tout aussi cruciale pour nos entreprises : le risque de requalification en emploi salarié des travailleurs indépendants collaborant avec des entreprises.

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Et pourtant, les sanctions financières et judiciaires encourues en cas de condamnation n’ont rien à envier à celles prononcées par les prud’hommes : le donneur d’ordre, qui peut voir sa responsabilité pénale engagée, risque jusqu’à trois ans d’emprisonnement et 225.000 euros d’amende, et de devoir restituer les avantages sociaux acquis pour l’ensemble de ses salariés sur la période.

Dans ce contexte, de trop nombreux chefs d’entreprise préfèrent renoncer à recourir aux services des travailleurs indépendants, les privant d’un puissant levier de développement de leur activité. De même, plus d’un travailleur indépendant sur deux souhaiterait pouvoir travailler en réseau avec d’autres indépendants, mais la menace de la requalification pèse également, leur confisquant une réserve de croissance non négligeable. Il y a donc urgence à désamorcer cette bombe à retardement que constitue la requalification pour les entreprises et ainsi leur permettre d’ouvrir leurs portes aux compétences des travailleurs indépendants. A la clé : un potentiel d’un million d’activités supplémentaires.

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La convergence des protections sociales pour permettre une réelle équité de droits sociaux entre tous les actifs, salariés comme indépendants, est la première étape dans la sécurisation de la requalification. En effet, la motivation principale du juge pour requalifier est avant tout de donner au travailleur indépendant les droits sociaux dont il aurait bénéficié en tant que salarié. L’égalité en matière de protection sociale la rendrait donc implicitement caduque. L’universalité du droit au chômage et du système de retraite que l’exécutif souhaite mettre en place va dans ce sens. Il faut désormais en préciser les conditions, mais également avancer sur la parentalité et les accidents du travail, pour lesquels la couverture des indépendants demeure bien trop faible. Les indépendants eux-mêmes l’appellent de leurs vœux, et sont majoritairement prêts à la financer via une hausse modérée de leurs cotisations.

Le portage salarial : une vraie alternative

Mais pour lever toutes les craintes des chefs d’entreprise, il faudrait également encadrer juridiquement la sanction. A l’heure où l’on évoque les contours d’un droit à l’erreur pour les entreprises, pourquoi ne pas limiter la condamnation pour travail dissimulé aux cas où l’infraction est aggravée et multiple ? Dans tous les autres cas où le donneur d’ordre apparaît de bonne foi, la sanction ne serait plus pénale mais se cantonnerait à un rattrapage des cotisations sociales. Une réflexion doit également s’engager pour construire un cadre juridique simple, permettant aux indépendants de collaborer pour répondre à des appels d’offres.

La campagne et la feuille de retour d’Emmanuel Macron peuvent nous donner l’espoir que les attentes des 2,8 millions de travailleurs indépendants, dont 1,1 million d’autoentrepreneurs, ne seront pas ignorées longtemps. Mais il n’est plus possible d’attendre pour réconcilier toutes les formes de travail et enfin donner à notre pays la chance de faire naître et croître un million de travailleurs indépendants supplémentaires.

 

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François Hurel / président de l’Union des autoentrepreneurs